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Articles

Affichage des articles du février, 2021

Qu'il est lourd le mot "trans"

 Il y a encore débat sur le sujet, mais globalement, en France, le mot "transgenre" remplace le mot "transsexuel". Parce que ce dernier renvoie à ce qui était considéré comme une maladie psychiatrique, et qui renvoyait à une réalité extrêmement négative. C'est une très bonne chose, sauf que... l'abréviation "trans" n'a pas bénéficié de cette remise à zéro. Et donc, le mot transgenre, pas vraiment non plus. Les gens ne savent pas de quoi il s'agit, et quand on leur explique... ce sont tout de suite des images abominables qui viennent, pour la plupart. Forcément. Donc quand je dois dire "je suis transgenre", j'ai honte. Parce que la charge négative est toujours aussi forte. Il suffit de lire les commentaires sur les publications qui parlent de nous. Il suffit de voir les fantasmes qui continuent à circuler sur nous. Il en résulte que ce mot, avec toute cette charge, ne correspond en rien à ma réalité. D'ailleurs, personne ne...

Je n'ai jamais voulu être une femme

 Une phrase prononcée par une détenue dans Orange is the new black à propos du personnage joué par Laverne Cox m'a profondément marquée, parce qu'elle résume, je pense, une véritable problématique pour toute femme trans. "Elle a gagné le gros lot au loto de la vie et elle demande à ce qu'on lui rembourse son ticket!". Voilà pourquoi beaucoup nous voient comme des cinglé(e)s. C'est effectivement totalement illogique, absurde. Je suis blanche, valide et en apparence un mec et hétéro. Il ne me manque que la célébrité et la richesse pour faire carton plein niveau privilèges. Et j'ai entamé une transition médicale qui doit m'en faire une grosse partie de ces privilèges. Mon cerveau ultra-rationnel, dont les émotions sont filtrées, n'aime pas ça du tout. Ca n'a absolument aucun sens. C'est pourquoi au niveau social, j'avance avec le frein à main. C'est pourquoi au niveau vocal, il m'est compliqué d'abandonner une voix perçue comme...

Peur de devenir "moche"?

  Comment pourrait-on m'aimer, moi transgenre, si moi-même j'ai toujours cette forme de rejet, viscéral et néanmoins acquis, envers les personnes trans? Comment pourrais-je me considérer comme aimable si... je ne le suis effectivement pas. Je me déteste parce que je suis trans et aussi parce que je suis transphobe. Génial. Ca m'a l'air bien engagé, cette histoire. L'idéal serait probablement de rencontrer régulièrement des gens comme moi, en vrai. Sauf qu'on est en pleine pandémie, avec couvre-feu et tout et tout.  J'ai vu sur Twitter que beaucoup de personnes trans auraient la trouille de transitionner par peur de devenir "moche". C'est intéressant.  Qu'est-ce que ça veut dire "moche"? Personne n'a la même définition, et heureusement. Mais dans ce contexte, j'ai l'impression que ça signifie "qui ressemble à un trans, autrement dit un mec qui essaie de ressembler à une femme". Et effectivement, même si ça res...

Et pourtant, je n'éprouve pas d'euphorie

 Voilà plus d'un mois que je n'ai plus de pomme d'Adam et à peu près trois semaines que je n'ai plus de pansement. Juste une cicatrice, comme une griffure de chat, à un endroit que je ne pouvais regarder, et encore moins toucher, sans avoir une suée d'angoisse. Je ne savais vraiment pas comment j'allais réagir. Je m'attendais à tout. Je m'attendais à vivre un véritable cauchemar, à ne pas supporter l'idée qu'on ait pu toucher à cet endroit, qui plus est avec un scalpel. Je m'attendais à un véritable soulagement, la réaction la plus logique prévisible. Je comparais toujours ma pomme d'Adam à une mygale qui serait en permanence sur la gorge d'un arachnophobe, alors... Hé bien non. Je peux regarder cette zone et même la tripoter sans aucun problème. La phobie, la dysphorie sont parties. Mais aucune scène de liesse. Ma gorge est devenue "normale", comme elle aurait toujours dû être. Pourquoi je me réjouirais?  J'avoue ne pas...

Entre placard et exhibitionnisme

 Depuis la puberté, je canalise ma transidentité. La plupart du temps, je la planque et puis dès que j'ai l'occasion, je la laisse exploser. C'est d'autant plus vrai depuis ma transition. Moi qui abhorrais les selfies, voilà que j'en ai des centaines sur mon téléphone. Et je les partage, ce qui signifie que j'apprécie ce que je vois sur ces photos, que je n'en ai pas honte, que j'en suis même fière. On est donc sur un paradoxe. Pourquoi passer mon temps à cacher ma transidentité si... je suis fière de mon apparence? Parce que les photos ne montrent qu'une partie soigneusement choisie et éclairée de moi, et que les autres parties ne me font pas le même effet. Parce que la communauté, sur les réseaux sociaux, me rappelle quotidiennement ce que peut subir une personne identifiée comme trans. Alors j'évite de prendre des risques. Mais la pression est de plus en plus forte. Plus le temps passe, plus ma transition avance et plus il m'est pénible de...