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Intermède: "ça fait quoi d'avoir une chatte?"

 On m'a posé la question il y a quelques jours. Sans malice, sans mauvaise intention. Et pourtant. Quand elle m'a fait remarquer que j'allais échapper aux règles, je me suis sentie obligée de lui répondre que je suis en train de "rattraper" toutes les règles et tous les accouchements auxquels j'ai échappé, avec cette opération et cette convalescence.

Parce que moi j'ai entendu "tu n'es pas tout à fait une femme. Tu échappes à une partie de ce qui définit la féminité. Ta condition n'est pas tout à fait la même que la mienne." Et il y a du vrai là-dedans, même si bien sûr, certaines femmes n'accouchent pas et que les règles ne sont pas systématiquement mal vécues.

Ce n'est pas la première fois que je l'entends, et je comprends qu'une femme qui vit mal ses règles, qui a vécu des accouchements compliqués puisse me le claquer à la figure. Même si je n'en suis pas responsable. Et il se trouve que, même si je ne devrais sans doute pas, j'ai un complexe sur ce sujet qui alimente mon syndrome de l'imposteur et ma transphobie intégrée.

C'est pour cette raison que j'ai prononcé une phrase qui a choqué ma psy, lors de notre visio. Je ne sais plus exactement quelle était cette phrase, mais en substance, je lui ai dit que cette épopée, cette souffrance m'aide, d'une certaine façon, à vaincre ce syndrome de l'imposteur. Parce que grâce à elle, j'ai cette réponse: "je suis en train de rattraper toutes les règles et tous les accouchements auxquels j'ai échappé." Je mérite ce titre de femme.

Ma psy a ri nerveusement et m'a fait remarquer à quel point il est terrible de voir les choses comme ça, de percevoir la féminité comme quelque chose qui se mérite dans la souffrance. Je suis, intellectuellement, d'accord avec elle. J'ai conscience que c'est en effet terrible, mais c'est de cette façon que je le vis, avec mon passé, ma transphobie intégrée, mes clichés, toutes ces pensées qui hantent mon esprit, moi qui suis née en 1979.

Ce n'est pas la raison qui m'a poussée vers cette opération. Ça n'aurait pas suffi. Mais elle y a contribué. Et ça me semblait important d'aborder cet aspect qui éclaire notre vision sociétale de la féminité. Une vision en plein bouleversement, avec la toujours récente mise en lumière de la transidentité, l'évolution du courant féministe, la redéfinition des genres, des rôles genrés, des rapports hommes-femmes...

Je laisse néanmoins aux sociologues et autres scientifiques le soin de tirer des conclusions.

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