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La solitude

 J'en parle souvent, dans ce blog, parce que c'est ce qui me terrifie le plus. 

Ma vie sociale s'est sacrément cassé la gueule depuis que j'ai entamé ma transition. C'est un fait. 

Les amis que je voyais régulièrement, je les vois beaucoup moins, voire plus du tout. Les amis que je voyais rarement, je n'ose plus les voir, parce que j'appréhende la façon dont ils vont voir (juger) les changements. Je n'ai plus de vie sentimentale, ou sexuelle, parce que mon corps est entre les deux et j'en ai honte.

Je n'ai jamais aimé mon corps et c'est rien de le dire, mais avant, il correspondant à la norme. Il trop maigre, trop blanc, pas assez musclé, trop ceci, pas assez cela, mais je pouvais me dévêtir sans avoir peur de provoquer une réaction violente.

Ce n'est clairement plus le cas.

Au delà des relations intimes, je me pose la question en permanence, dans le cadre professionnel comme avec chaque personne que je suis amenée à croiser: est-ce qu'il ou elle va me voir comme un monstre, une arnaque, une mauvaise blague?... 

De base, je manque de confiance en moi, alors, avec la transition, c'est devenu vraiment très compliqué de me dire qu'une personne peut me trouver intéressante ou belle. Si ça arrive, je me dis systématiquement que c'est parce que cette personne ne me connaît pas vraiment, ou alors elle est bien gentille... de me cacher ce qu'elle ressent réellement. Si elle me voyait à poil, elle vomirait sûrement. Ou alors, elle est désespérée.

C'est pour cette raison que je me concentre sur l'écriture à temps plein et presque de façon obsessionnelle: j'ai besoin d'être connue et reconnue comme autre chose que trans, comme autre chose que cet étrange "voisin" qui passe son temps à se cacher, à fuir les regards, que ce confrère qui ne semble pas bien savoir si c'est un homme ou une femme, dans le fond... 

Je passe mon temps à switcher entre elle et il, suivant les circonstances, et je perds tout le monde avec cette attitude. "Ne m'en veux pas si je me trompe et que je te genre au masculin, c'est pas fait exprès.". On me le dit assez souvent, et je réponds toujours que... moi aussi, ça m'arrive souvent de me tromper. Et c'est vrai, dans le fond.

Je suis trop mal à l'aise pour envisager de m'imposer, de dire "je suis une femme", c'est comme ça. Je n'ai, surtout, pas envie d'avoir à faire ça. Parce que si j'ai à le faire, ça signifie que ce n'est pas évident... 

Après la féminisation du visage, la situation devrait évoluer, mais d'ici là, il va falloir que je clarifie les choses avec pas mal de monde, quitte à ce qu'il y ait de la casse.

Je ne peux pas rester indéfiniment dans ce foutu placard. Seule.

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