D'après ma mère, j'ai toujours été sujette aux insomnies. "Quand tu étais bébé, ton père passait ses nuits à te chanter des berceuses avec sa guitare". Très tôt, il y a eu la peur des fantômes. Je dormais soit avec la lumière allumée, soit, au moins avec la porte entrouverte, pour laisser entrer la lumière.
J'avais vraiment la trouille et ça m'empêchait de dormir, mais pas de vivre normalement.
Ensuite, il y a eu la dépression, en 2000. Il n'y avait plus de fantômes. A l'extérieur. Mais dans ma tête...
Et depuis, je passe mon temps à lutter contre l'insomnie. Même si j'ai compris, il y a bien longtemps, que lutter pour dormir... c'est contre-productif.
J'ai tenté énormément de choses, des moutons aux hypnotiques en passant par la respiration, la cohérence cardiaque, tout ça. Le plus efficace aura été de laisser tomber, de les accepter, de me dire "ok, impossible de m'endormir avant deux heures. Il faut que je me réveille plusieurs fois par nuit. Soit, c'est comme ça. Je vais adapter ma vie à ça, autant que je peux." Moins de pression, moins d'insomnies.
Cette nuit, j'ai dégusté. La proximité de l'opération et le test PCR qui m'attendait ce matin ont visiblement eu plus d'impact sur mes nerfs que je ne l'aurais cru. Les joies de la dissociation traumatique, j'imagine: devoir se demander pourquoi on se retourne comme une crêpe toute la nuit. Plus les cauchemars. Les fantômes...
Et me voilà à m'engueuler. Une partie de mon cerveau qui engueule une autre, comme un gosse. "Non mais sans déconner... Ca va aller, je vais pas mourir. Et je vais pas avoir besoin de me lever tôt. A quoi ça rime tout ça? Je vais encore galérer toute la journée, être explosée, devoir reporter l'orthophoniste, peut-être même les courses. Et tout ça pour quoi? Parce que tu flippes ta race d'un test PCR... Un caprice, comme un gosse!"
Et puis la journée, idem: "Et voilà! Comme d'habitude, c'était disproportionné! Une nuit pourrie pour quoi? Quelques secondes désagréables, certes, mais tellement dérisoires. Il y a des hypocondriaques qui font ça toutes les semaines. Franchement..."
Mais cette fois, une pensée m'est venue. "Comme un gosse... C'est comme ça que je traiterais un gosse, moi? En lui gueulant dessus? En l'inondant de reproches? Alors que manifestement, ça ne sert à rien?" L'idée, ce ne serait pas plutôt la bienveillance, encourager, rassurer? Est-ce qu'on gueule sur un bébé qui galère à dormir? Non, on lui chante une berceuse, on le prend dans ses bras, on fait en sorte de l'apaiser.
C'est un de mes problèmes. Je manque de bienveillance envers moi-même.
Pourtant, malgré cette nuit pourrie, j'ai fait mon test PCR, qui devrait moins m'angoisser la prochaine fois (même si c'est très désagréable!) et je suis négative. J'ai effectivement reporté ma séance d'orthophonie, ce qui est sans aucune gravité. J'ai fait mon ménage, mes courses et... même un peu de Just Dance et quelques étirements. C'est dire si ce "caprice nocturne" aura eu de lourdes conséquences.
C'est vrai, cette journée ne méritait pas de passer une nuit aussi pourrie, mais... cette nuit ne méritait pas non plus que je m'énerve contre cette partie de moi, qui a ses raisons, cachées, cryptées, pour agir ainsi. Tout comme un bébé, incapable de s'expliquer et qui a besoin de bienveillance.
Après tout, ça fait un sacré paquet d'années que je mène ma petite vie, avec ces caprices nocturnes. Oui, je pourrais, peut-être, vivre mieux sans, mais... c'est là, j'ai un peu morflé, ce qui peut expliquer et j'en connais qui n'ont pas le même souci et qui ne s'en tirent pas aussi bien.
Lutter est contre-productif.
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