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Mon ressenti?

Le psy du dispositif T m'avait dit qu'il ne pouvait se prononcer sur ma dysphorie de genre tant que j'étais déconnecté(e) de mes émotions. Et il avait raison. C'est même une évidence. Il fallait que je fasse le ménage dans ma tête, avant d'entreprendre une transition... que j'avais déjà démarrée, et pas qu'un peu.

Aujourd'hui, les choses sont beaucoup plus claires, mes émotions sont revenues, j'arrive bien mieux à me cerner. Et le fait est que je doute de plus en plus fort. Même si à chaque fois, je finis par les chasser, à coups de raisonnements logiques (l'habitude, quand les émotions nous trahissent depuis longtemps). Et c'est là que ça merde, justement.

Depuis le début, j'ai conclu à ma transidentité par un raisonnement logique. Je n'avais pas le choix vu que je ne disposais pas d'autres outils. Et ma transition allait donc de soi.

Sauf qu'aujourd'hui, je dois faire le constat que j'éprouve quantité d'émotions négatives lorsque je pense à ma transition et à mon avenir en tant que femme trans.

Ces derniers temps, mon inconscient se manifeste par des rêves dans lesquels je suis heureux, en tant qu'homme, avec des femmes. Et à mon réveil, il faut bien que je me dise "ha ben non, ça va pas être possible, ça!".

Et cette perspective me hante tout autant la journée. Tous les jours.

Alors, j'essaie de me projeter dans la même situation en tant que femme trans. Après tout, pourquoi ce ne serait pas possible? Mais je n'y arrive pas. Ca ne me fait pas envie.
J'essaie donc de me projeter en tant que femme trans, avec un homme. Encore moins. Rejet. Niet!
Dernière tentative: en tant que femme trans, tout court. Je m'imagine avec un passing de ouf, un corps bien féminin. Je m'imagine même en tant que femme cis, avec des ovaires. Allez coup de baguette magique! Hé bien je me sentirais mal à l'aise. Voilà: mal à l'aise.

Là, ma raison, toujours elle, me dit "Hé mais c'est normal: question d'habitude, cocotte! Faut le temps de t'y faire à ton nouveau costume! Et justement, la transition, c'est progressif!". Ma raison a toujours raison. Sauf quand il s'agit de ressenti.

Depuis plusieurs jours, j'ai le sentiment que je suis passé(e) à côté de quelque chose, qu'il y a une faille dans mon raisonnement. Alors que ça fait quelque chose comme 2 ans que je passe ma vie à retourner la question dans tous les sens. Justement, là encore. Ce n'est pas normal que je sois obligé(e) de revoir ma logique en permanence. Ca veut dire qu'il y a au fond de moi quelque chose, une intuition, un ressenti qui me pousse à ça, qui essaie de me faire comprendre que je suis dans l'erreur. Et maintenant que je retrouve mes facultés, ce quelque chose pousse de plus en plus fort.

La vérité est que spontanément, je ne me comporte pas du tout comme une femme. Que je ne me sente pas femme, c'est un fait qui peut s'entendre: je ne ressemble pas à une femme et personne ne m'a jamais vraiment considéré(e) comme une femme. Mais me comporter un tant soit peu comme une femme me demande des efforts. Ce n'est pas naturel: c'est un rôle.
La vérité est qu'intérieurement, il y a un large fossé entre une femme et moi. Je peux la singer, mais pas bien longtemps. Et mal.

Je crois savoir ce qui merde dans mon raisonnement, depuis le début. Je l'avais sous le nez, c'était évident. Trop, peut-être, pour que je le comprenne, ou que je l'admette.
Mon "envie" d'être une femme est depuis le départ quasi exclusivement liée à ma libido... et à ma solitude. En l'absence de cette frustration, ça me va bien d'être un homme. A ceci près que j'ai subi des traumatismes qui ont eu des conséquences. Conséquences qui sont en bonne voie de résolution. Conséquences néanmoins que j'ignorais jusque récemment, raison pour laquelle j'ai pu les attribuer à une dysphorie de genre.

La vérité est que la femme que j'essaie de voir dans mon miroir est celle que je ne tiens pas dans mes bras, celle que je ne peux sentir sous mes draps.
Et avec cette transition, je me condamne à ne la voir que dans mon miroir. Dans toute son imperfection. Et donc à figer dans le marbre ma frustration. A ne plus vivre que dans le fantasme.

Maintenant, il ne me reste plus qu'à intégrer ces éléments à ma logique. Réunifier raison et émotions.

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