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Moments de doute

J'ai la poitrine qui pousse, et ça commence à se voir. J'en viens même à me dire que si ça continue à ce rythme, elle va être "énorme" (suivant mes critères, évidemment). 
Le rendez-vous pour la dermato est pris et ma barbe va donc progressivement disparaître.
Je n'ai toujours pas pris rendez-vous pour ma pomme d'Adam, parce que... je n'ai toujours aucune réponse à mon recours concernant ma demande d'ALD. Je trouve que ça commence à faire sacrément long et je n'ai pas plus de réponse à mon mail de relance.
J'ai tenté de prendre rendez-vous à Lyon pour la vaginoplastie, mais.... le docteur qui va bien est surbooké et ne prend plus personne. Bordeaux et Marseille, mon toubib m'a formellement déconseillé. Reste Lille qui doit ouvrir un nouveau service, prometteur, à la fin de l'année. Mais forcément, personne ne sait à l'heure actuelle ce que ça va valoir. Sinon, c'est l'étranger et là il faudrait débourser des montants qui pourraient permettre de s'acheter au mieux une petite bagnole neuve, au pire une grosse bagnole que je n'ai même jamais rêvé d'avoir.
A mon boulot, ils sont partiellement au courant et aucun souci (même s'ils ont un peu buggé). Reste à prévenir l'autre partie des gens que je côtoie quasi tous les jours professionnellement.
Mes parents... Ma soeur est au courant, et c'est à peine si elle a tiqué. Mon père, je pense qu'il a compris, mais je n'ai pas été plus explicite que de lui dire que je me "transforme". Idem avec ma mère, sauf qu'elle n'a pas compris. Et vu son état de santé, j'ai aucune envie de lui infliger un stress en ce moment. Qu'ils le prennent bien ou mal, c'est secondaire. L'important pour moi, c'est qu'ils n'en souffrent pas.

Donc les choses avancent, à leur rythme.
Et je n'arrive absolument pas à me projeter. Je suis dans le brouillard total. Avec une trouille bleue de me retrouver avec les seins de Scarlett Johanson, tout en arborant toujours ce foutu filet de barbe et cette horrible pomme d'Adam. Sans parler de ma voix.
J'appréhende avec angoisse la question "mais... vous êtes un homme ou une femme?" prononcée naïvement par un ou une inconnue.
Parce que pour le moment, je ressemble toujours à un mec. Pas bien viril, c'est peu dire (même si je ne l'ai jamais été, forcément...), mais quand même. Donc, je continue à faire comme j'ai toujours fait.
Sauf qu'à un moment.... il risque d'y avoir une période de basculement que j'espère rapide.
Je vais pas rester enfermée chez moi pendant quoi? six mois?, le temps que je ressemble suffisamment à une femme. C'est financièrement pas possible, hein?
Là, déjà, quand je me regarde dans un miroir, je déprime. Différemment d'avant. Parce qu'avant, déjà, j'évitais les miroirs. Alors que là, évidemment, on est limite dans l'addiction. Il faut que je regarde si ça se voit que mes nichons ont déjà bien poussé ou pas.
Et je n'ai aucune envie de me "déguiser", de jouer un rôle, de masquer. Parce que la plupart du temps, quand on essaie de masquer, on obtient le résultat inverse. Si je mets du maquillage sur ma barbe par exemple, je ne vais penser qu'à ça. Et ça va se voir.

D'où les doutes.
Il m'arrive régulièrement de me dire "mais putain! Qu'est-ce que j'ai foutu? Pourquoi je suis pas resté comme avant? Pourquoi je me suis lancé là-dedans???"
Ca m'arrive en général après avoir discuté avec une personne qui n'est pas au courant. Une personne qui m'a apprécié dans mon identité actuelle. On m'apprécie comme ça, pourquoi changer?
Ben parce que moi je ne me supporte pas comme ça et que ce n'est en général pas mon apparence que la personne apprécie, mais ma conversation, mes qualités morales. Je n'ai d'ailleurs jamais vraiment brillé par mon physique... D'autant que je passais mon temps, de façon inconsciente, à le foutre en l'air. "Mal fagoté", "débraillé" sont des qualificatifs que j'ai très souvent entendu. Bah ouais, au mieux je m'en foutais, vu que je me trouvais hideux, au pire il fallait que je fasse fuir celles qui pourraient être attirées par moi (vous n'imaginez pas à quel point je suis douée pour ça). Parce que sinon je me serais sentie obligée socialement de me lancer dans une relation frustrante qui m'aurait contrainte à jouer le mec en permanence, sans jamais souffler. Donc nécessairement, ça a foiré à chaque fois.

Solution: continuer à en parler autour de moi, progressivement. A chaque fois, c'est de l'angoisse en moins, je démine le terrain, même si ça doit péter au moins c'est fait. Et pour le moment, faut quand même que je garde en tête qu'il n'y a eu absolument aucune explosion. Ca arrivera, et encore c'est même pas sûr, mais faut pas crier avant d'avoir mal. De toute façon, les gros, les grands, les moches, les maigres, les Arabes, les Juifs, les Roumains, les blacks, les roux, les handicapés, les flics, les militaires, les journalistes, les femmes, les artistes, les politiques, les fachos, les gauchistes s'en prennent aussi plein la gueule (liste non exhaustive). C'est comme ça. Bon c'est sûr que dans la liste, j'en cumule déjà quelques uns à bien y regarder. ^^

Ha oui et puis j'ai évolué aussi au niveau de mon prénom. Je vais conserver Laure comme pseudo d'écrivain mais pour la vie de tous les jours, j'ai trouvé un compromis qui me plaît bien et qui devrait ne pas trop perturber mon entourage.

Allez, comme le chante Shirley Manson "The trick is to keep breathing".

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