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Ce que j'ai peur de perdre

(Ecrit le 05/10/17)

Aujourd'hui, j'ai pris rendez-vous avec un médecin généraliste, néanmoins spécialisé dans la question transgenre, comme me l'avait recommandé mon psychiatre. "Ha? C'est pour une transition?", m'a demandé la secrétaire. Wow hey! J'ai pas pris cette décision, moi, encore! Je veux juste un maximum d'infos pour pouvoir la prendre, justement.

Il a suffi d'un seul mot pour mettre mon cerveau en ébulition. Pour me projeter, comme si j'allais sortir de là avec une paire de nichons et le service trois pièces dans un Tuperware. Et donc pour m'amener à m'imaginer la vie sans cette quinzaine de centimètres. Et donc mesurer le courage nécessaire pour prendre une telle décision.

Parce que... ce truc fait partie de mon histoire, de mon identité, que je le veuille ou non. Je me suis construit autour de ça, en mettant "le reste" de côté, sous le tapis. J'ai pris du plaisir avec ce truc, et j'en prends encore, même si ça demande des efforts d'imagination et de concentration. Mon univers a été construit autour de cette identité mâle, hétéro. Des gens que j'aime pourraient être déçus, se détourner de moi. Et si j'ai toujours mis Laure sous le tapis, c'est parce que je leur donnais raison. Sans vraiment savoir ce qu'ils en penseraient, au final.

Oui, c'est foireux. Cette vie, c'est dépression, pulsions suicidaires, apathie, morosité, frustration, solitude... Mais c'est MA vie, mon identité, mon passé. Et ce n'est pas que dépression, pulsions suicidaires etc. C'est aussi de belles choses, des moments de bonheur, des victoires. Et si après cette transition, c'était pire? Faut pas se louper. Vraiment pas.

Pour moi et pour le moment, "transition" est presque un synonyme de "suicide". Mort de ce que j'ai été jusque-là, castration (un mot toujours assimilé à de la torture, de la mutilation, de l'assujetissement...), suicide social.

Depuis quelques années, j'éprouve une certaine fascination pour les Suicide girls. Pour leur beauté, bien sûr, mais aussi leur courage, leur personnalité... Aujourd'hui, je saisis mieux le concept, et les raisons inconscientes de cette fascination.

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